Un jour en Birmanie… avec Monique Erbeia

Un jour en Birmanie… avec Monique Erbeia

6 mars 2015

Monique Erbeia, administratrice d’Entrepreneurs du Monde, était invitée à représenter notre association à l’édition 2014 du Women’s Forum qui se tenait en Birmanie. Elle nous partage ses impressions sur ce pays et notre action sur place.

L’arrivée à Yangon, capitale économique de la Birmanie, est étonnante : sur les grands boulevards de cette ville en plein développement économique, s’étalent des boutiques de luxe et des publicités pour des marques mondiales. Des milliers de femmes et d’hommes s’affairent. Des enfants des rues aussi. Après la chaleur tropicale, la lumière dorée et la vitalité de la ville, ce sont les embouteillages qui me surprennent : beaucoup de voitures neuves et même quelques voitures de luxe côtoient de nombreux vélos et bus surchargés transportant hommes et femmes dans des conditions très éprouvantes. Ces contrastes me sautent aux yeux dès l’arrivée.

Dala, une zone très peuplée, dépourvue de tout, aux portes de la capitale

Alexandre Goutchkoff, le responsable d’Entrepreneurs du Monde en Birmanie, m’accueille et m’embarque vers Dala, au sud de la Yangon River. Dix minutes à peine de traversée et je découvre cette zone périurbaine marécageuse largement rurale et « sous-développée », notamment à cause de l’absence de pont la reliant au centre-ville. Depuis les années 80, l’arrivée de nombreuses populations déplacées, suite aux conflits et à l’exode rural, a fragilisé le tissu social et accru la vulnérabilité des communautés aux aléas économiques et sanitaires. Aujourd’hui, environ 150 000 personnes vivent dans cette zone fortement touchée par le cyclone Nargis en 2008.

La différence avec le centre-ville est frappante. Ici, je vois beaucoup de vélos-rickshaws, de scooters, de petites maisons en bois, de bien maigres étals au bord des routes en terre battue. Le quartier est très vivant, niché dans une végétation luxuriante. Mais les conditions de vie y sont très dures. Les gens ont très peu accès aux services de base : éducation, formation, santé, électricité, services financiers.

C’est là qu’agit Entrepreneurs du Monde

Depuis 2013, à Dala, Entrepreneurs du Monde apporte un appui à des groupements communautaires (Self Help Groups), en partenariat avec PU-AMI*. Elle les aide à mettre en place un fonds autogéré pour accéder à des services tels que le crédit, l’épargne, la couverture sociale et pour financer des projets communautaires de façon pérenne.

* PU-AMI : Première Urgence-Aide Médicale Internationale

En 2014, pour soutenir aussi les populations les plus vulnérables dans le développement de leurs activités génératrices de revenus, Entrepreneurs du Monde a créé ici un programme de microfinance, Sont Oo Tehtwin (« entrepreneurs » – SOO). Elle leur apporte des services financiers d’épargne et de crédit, ainsi que des formations.

Ma rencontre avec l’équipe locale de SOO se fait à l’heure du déjeuner, quand les trois agents de crédit reviennent de leurs visites terrain. La responsable des activités, Myo-Myo Zin, nous accueille et me présente l’équipe. Un agent m’explique son activité, montre ses supports de formation, ses questionnaires, ses tableaux de suivi développés selon la méthodologie Entrepreneurs du Monde. Il suit environ 200 micro-entrepreneurs.

L’après-midi, nous partons rejoindre un groupement communautaire. Après 20 minutes de scooter dont la moitié sur une route secondaire mal entretenue, c’est à nouveau un changement total d’environnement : zone rurale, paysannerie traditionnelle, élevage et culture, quelques maisons rassemblées entourées de rizières.

Le groupement nous accueille dans la maison communautaire. Les vingt-et-un membres de ce Self Help Group sont toutes des femmes. Elles écoutent attentivement leur déléguée comptabiliser à haute voix les remboursements et dépôts. Ceux-ci sont consignés dans les carnets individuels et les registres collectifs fournis par Entrepreneurs du Monde. Le prêt individuel moyen est de 44 €, remboursable en cinq mois. Les intérêts alimentent le fonds communautaire. Celui-ci permet de financer un centre de santé, d’entretenir le service d’eau potable ou encore d’aider un membre confronté à une difficulté particulière. L’agent d’Entrepreneurs du Monde forme le groupe aux outils de gestion et à des sujets pratiques comme la gestion budgétaire du ménage, la protection de l’enfant, etc.

Aujourd’hui, Entrepreneurs du Monde a plus de 600 emprunteurs actifs dans 5 quartiers de Dala et continue de soutenir quinze groupements communautaires, soit près de 400 membres. Son objectif à 3 ans est de soutenir 10 000 familles.