Yikri, des débuts prometteurs !
Hélène Chéron-Kientéga est la coordinatrice des programmes d’Entrepreneurs du Monde au Burkina Faso. Elle raconte le démarrage en flèche de YIKRI, le programme de microfinance sociale créé en février par Entrepreneurs du Monde.
Vous avez démarré votre action dans les quartiers périphériques de Ouagadougou. Pourquoi ce choix ?
« Ces quartiers sont en pleine explosion démographique. Les jeunes issus de l’exode rural y sont très nombreux et les conditions de vie, extrêmement précaires. Ce sont des viviers de micro-entrepreneurs mais les institutions de microfinance classiques ne les soutiennent pas parce qu’ils ne présentent aucune garantie. YIKRI s’est donné pour mission de leur donner une chance. »
Quelle est la spécificité de vos services ?
« Les personnes que nous appuyons n’ont que de très faibles notions de gestion. Nos formations leur donnent les clés pour mieux gérer leur activité. Ensuite, lorsqu’un bénéficiaire demande un crédit, l’animateur va le voir sur son lieu d’activité. Ensemble, ils font une analyse chiffrée de l’activité pour calculer les revenus brut et net, trouver des façons d’abaisser certains coûts, mesurer le besoin de financement et la capacité de remboursement, etc. C’est souvent la première fois qu’un tel travail est fait.
L’épargne obligatoire est aussi essentielle
Au début, le dépôt de 0,75 € demandé à chaque réunion bimensuelle leur semble contraignant mais très vite, les montants déposés augmentent spontanément. Certes, ces montants restent faibles, à l’image des capacités financières des bénéficiaires, mais pour nous, quelqu’un qui dépose 0,90 € plutôt que les 0,75 exigés, prouve qu’il a compris le sens de l’épargne et c’est un grand pas !
Malgré toutes ces précautions, certaines personnes peuvent subir un événement qui accentue leur fragilité. Par exemple, une bénéficiaire n’a plus reçu de signe de vie de son mari, un orpailleur qui lui versait chaque semaine une petite somme pour l’entretien des enfants. Avec elle, nous avons trouvé des solutions pour résoudre la crise. C’est ça aussi l’aspect « social » de notre méthodologie de microfinance. »
Aujourd’hui, où en êtes vous ?
« Nous avons déjà 2 200 épargnants (commerçants, tisserandes, cuisinières de rue, etc.), dont la moitié a un prêt en cours. »
Quels sont les facteurs clé de ce 1er succès ?
« Je dirais la confiance et l’équipe ! Nos bénéficiaires vivent dans une grande pauvreté. Ils ont tous des parcours de vie complexes et durs. On leur fait rarement confiance. Nous, nous leur donnons l’occasion de prouver qu’ils sont dignes de confiance. C’est pour eux une chance de réintégrer le tissu social et ils la saisissent ! Quant à l’équipe, nous avons fait un gros effort de formation et d’intégration et chaque lundi tous les animateurs se retrouvent pour partager les réussites et les difficultés. Chacun se sent épaulé, soutenu. »
Et demain ?
« Nous venons d’ouvrir un deuxième point de service à Ouagadougou et en janvier nous ouvrirons un point de service à Diébougou dans le Sud Ouest du pays. Dans cette zone rurale très enclavée, nous allons toucher notamment des productrices de beurre de karité et des producteurs de coton. Nous les avons déjà rencontrés et ils nous attendent avec impatience ! Nous prévoyons ainsi d’accompagner 4 000 nouveaux micro-entrepreneurs en 2016 et 6 000 en 2017. »